top of page

Manuel de Campagne électorale de Quintus Cicéron

  • ma_mots_et_images
  • 2 juin 2024
  • 3 min de lecture

🗳️ A une semaine des élections européennes, je vous propose une petite plongée dans le monde électoral classique avec le "Manuel de Campagne électorale", lettre de Quintus Cicéron, écrite à son frère le grand Marcus Tullius Cicéron en 64 avant JC, dans le cadre de sa candidature comme Consul de Rome.


🗳️ Ce petit manuel est un régal à lire, avec le recul temporel, et notre connaissance du modèle clientéliste romain ! Mais il est tout autant d'actualité, puisqu'il met en avant toutes les astuces permettant de s'attacher des fidèles !


Et Quintus le résume bien : "Il existe trois choses pour forcer la sympathie et pousser les hommes à faire campagne : la reconnaissance pour services rendus, l'espérance et l'inclination naturelle".


En matière de reconnaissance, Marcus Tullius est bien placé, puisque, en sa qualité d'avocat, il a rendu redevables beaucoup de clients. Quand aux fidélités, il y a d'abord celles issus de l'ordre équestre, dont il fait partie, et bien sûr, il peut compter sur son éloquence pour être bien entouré.


🗳️ Mais, au-delà des fidélités déjà acquises, Quintus insiste sur le fait qu'il faut s'en créer de nombreuses, dans toutes les classes sociales, et que les élections sont le moments d'aborder des personnes dont on ne se préoccupe pas d'habitude, quitte à feindre l'intérêt : recevoir chez soi les quémandeurs, offrir des banquets, se déplacer en étant toujours entourés de ceux qui comptent, se rendre sur le forum quotidiennement pour "serrer des mains", saluer les gens par leur nom (et donc le connaître!), distribuer les flatteries, en bref, se rendre populaire par la démagogie !!! Un candidat donc doit occuper l'espace public, se rendre sympathique et incontournable. Je ne suis pas certaine que le message se soit bien propagé jusqu'à aujourd'hui.


Mais, bien sûr, ne soyons pas fou, les fausses promesses peuvent pleuvoir, pourvu qu'elles paraissent sincères :)


🗳️ Pour la petite histoire, Marcus Tullius Cicéron a bien été élu. Et la colère de son ennemi Catalina donnera lieu à la fameuse Conjuration, que Cicéron fera échouer.


Ce texte est suivi, dans le petit ouvrage, par une lettre de Marcus Tullius à Quintus, alors gouverneur de la Province d’Asie (pour simplifier une partie de l’Anatolie antique), écrite en 59 avant JC : « L’Art de Gouverner une Province ».


Cette lettre de Cicéron, le grand frère, grand orateur et maniant particulièrement la langue, est pleine de saveurs, tant il utilise les doubles-sens. Il répète régulièrement qu’il n’écrit pas pour critiquer son frère, qui est plein de sagesse, qu’il ne peut lui donner réellement de conseils pour ses fonctions (Quintus venait d’être prolongé d’une année dans ses fonctions en Asie). Mais, plus nous avançons dans la lettre et plus les remontrances pleuvent ! Il l’accuse ouvertement de mal choisir ceux qui l’entourent, de ne pas être assez méfiant. Il lui rappelle qu’il ne faut pas pouvoir être accusé de favoritisme et de manque de rigueur. Il lui reproche surtout sa colère, son irascibilité, qui est dénoncée jusqu’à Rome !


Il ne faut pas imaginer que Marcus Tullius donne de tels conseils, juste pour le bien-être de son frère, mais bien pour l’image qu’il renvoie, lui, à Rome, et l’impact que le comportement de Quintus pourrait avoir sur ses ambitions. Il l’avoue d’ailleurs, en conclusion de sa liste de récriminations, dans une phrase fascinante à lire : « Cela te sera très facile car tu as toujours désiré me plaire plus qu’à tout autre »… Bref, il est le Grand homme de la famille !


En conclusion, je tenais à vous citer une phrase de Marcus Tullius Cicéron, peut-être pas sincère lorsqu’il l’écrit, mais qui devrait être en tête de tout gouvernant : « A mon avis, ceux qui commandent aux autres doivent tout faire pour le bonheur de ceux qui leur sont confiés »…

Comments


@2025 -  ma_mots_et_images

bottom of page